Depuis le 23 avril 2025, l’Organisation des Nations Unies (ONU) multiplie les appels à l’action à l’occasion de la Semaine mondiale de la vaccination. Ce cri d’alarme ne vise pas à célébrer des victoires, mais bien à souligner un recul inquiétant.
Rougeole, méningite : la vaccination freine, les maladies reviennent

L’OMS alerte : certaines maladies enregistrent une forte hausse des cas
L’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’UNICEF et l’Alliance Gavi alertent sur une réalité cruelle : rougeole, méningite, diphtérie ou encore fièvre jaune regagnent du terrain, parfois dans des zones où elles avaient presque disparu. En 2023, 10,3 millions de cas de rougeole ont été recensés à l’échelle mondiale, soit une hausse de 20 % par rapport à 2022. Depuis 2021, la tendance est à la hausse constante.
Et ce n’est pas fini. En 2024, l’Afrique a vu bondir les cas de méningite : 5 500 suspicions en seulement trois mois, pour près de 300 décès. Quant à la fièvre jaune, elle ressurgit dans 12 pays africains, avec 124 cas confirmés cette année. Pire encore : l’Amérique n’est pas épargnée, 131 cas y ont été signalés dans quatre pays.
« Les flambées de maladies évitables par la vaccination augmentent dans le monde entier, mettant des vies en danger et exposant les pays à des coûts accrus pour traiter les maladies et répondre aux épidémies », a mis en garde le directeur général de l’OMS, Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, dans un communiqué daté du 23 avril 2025.
Les vaccins manquent de financement et la santé mondiale en pâtit
Derrière cette recrudescence, un facteur central : la chute brutale des financements. Dans près de la moitié des pays analysés par l’OMS – en majorité des pays à revenu faible ou intermédiaire – les campagnes de vaccination sont aujourd’hui modérément à sévèrement perturbées. En cause : une baisse des contributions des bailleurs historiques.
« La crise mondiale du financement limite sévèrement notre capacité à vacciner plus de 15 millions d’enfants vulnérables dans des pays fragiles et affectés par des conflits », a déclaré Catherine Russell, directrice exécutive de l’UNICEF. Le coût de l’inaction ? Une reprise du cycle morbide : absence de surveillance, pénurie de vaccins, flambées incontrôlées. Selon l’OMS, plus de 14,5 millions d’enfants ont raté toutes leurs vaccinations de routine en 2023 – un chiffre en hausse constante depuis la pandémie.
Pendant ce temps, Gavi tente de maintenir à flot son programme en lançant un appel urgent de fonds de 9 milliards de dollars, afin de protéger 500 millions d’enfants d’ici 2030.
L’alerte de l’ONU : vers un monde où les maladies oubliées reviennent faute de vaccins ?
L’ONU ne mâche plus ses mots. Les avancées de ces dernières décennies sont en train de se faire laminer par un triple mur : explosion démographique, conflits armés et campagnes de désinformation. Ajoutez à cela l’effondrement des infrastructures sanitaires dans certaines régions, et l’équation devient explosive.
La directrice de terrain de l’UNICEF à Enugu, Juliet Chiluwe, l’a rappelé lors de la Semaine mondiale de la vaccination : « Les vaccins sont la preuve que moins de maladies et plus de vie sont possibles lorsque l’on s’en donne les moyens ». À ce jour, les vaccins dits "essentiels" ont sauvé au moins 154 millions de vies en 50 ans – soit six vies par minute.
Mais ces chiffres sont en danger. Alors que le vaccin contre le papillomavirus (HPV) a vu son taux de couverture doubler en Afrique entre 2020 et 2023, la poursuite de ces efforts semble compromise. Même les campagnes contre le paludisme, pourtant renforcées avec l’arrivée de nouveaux vaccins, risquent la suspension.
Ce qui attend le monde : résurgence, instabilité, et coût humain
Ce qui est en jeu, ce n’est pas simplement une couverture vaccinale, mais un modèle de société fondé sur la prévention, la stabilité sanitaire et l’égalité d’accès aux soins. Le retour en force de maladies éradiquées dans certains pays ne relève plus de la fiction, mais d’un scénario plausible à court terme.
Les agences plaident pour un sursaut. « Les épidémies croissantes de maladies hautement infectieuses sont une préoccupation mondiale. La bonne nouvelle, c’est que nous pouvons riposter », a déclaré Dr Sania Nishtar, directrice générale de Gavi, avant d’ajouter : « Ces activités vitales seront en péril si Gavi ne reçoit pas un financement complet pour les cinq prochaines années ».