Pandémies : l’OMS signe un accord clé… sans les États-Unis

Le 15 avril 2025, les pays membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont validé par consensus un accord qualifié d’historique sur la préparation et la lutte contre les futures pandémies. Un moment présenté comme décisif, au terme de plus de trois ans de négociations tendues, nourries par l’amertume laissée par le chaos sanitaire et politique du Covid-19.

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By Stéphanie Haerts Last modified on 16 avril 2025 15h55
Pandémies : l’OMS signe un traité clé… sans les États-Unis
Pandémies : l’OMS signe un accord clé… sans les États-Unis © Shutterstock

Un texte forgé dans l’urgence pandémique

L’accord adopté vise à anticiper les futures crises sanitaires en mettant en place une architecture de riposte et de solidarité mondiale. Dans une déclaration en pleine nuit, Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, n’a pas caché son émotion : « Ce soir marque une étape importante dans notre voyage commun vers un monde plus sûr. Vous avez écrit l’histoire ».

Le texte prévoit notamment la création d’un système d’accès aux agents pathogènes et de partage des avantages (PABS), destiné à garantir un accès plus équitable aux outils sanitaires – vaccins, tests, traitements, produits à partir de ces agents. Il s’agit de contrer l’égoïsme observé lors de la dernière pandémie, quand certains États s’étaient arrogés l’intégralité des stocks de doses.

Le transfert de technologies, épicentre du bras de fer diplomatique

Au cœur de la bataille : la question des transferts de technologies. Les pays à faible revenu ont fait bloc, exigeant des garanties après avoir été laissés sur le carreau en 2020-2021. Mais les États abritant de puissants laboratoires pharmaceutiques ont refusé toute obligation, arguant des intérêts économiques et de la propriété intellectuelle.

Après des heures de tractations haletantes, un compromis de façade a émergé. Les transferts devront se faire « d’un commun accord », donc sur base volontaire. Une formulation floue, mais suffisante pour obtenir une signature. Anne-Claire Amprou, ambassadrice pour la santé mondiale, a salué l’adoption : « C’est un accord historique pour la sécurité sanitaire, l’équité et la solidarité internationale ». Le dispositif reste toutefois fragile. L’accord repose davantage sur la bonne volonté que sur un mécanisme contraignant. Autrement dit, on espère mieux faire la prochaine fois, sans être vraiment prêt à imposer des règles.

Une unité sans Washington, la grande absente

Mais cette soi-disant unanimité cache une faille béante, l’absence des États-Unis. Retirés de l’OMS sous la présidence de Donald Trump, les Américains n’ont pas participé aux négociations. Le retrait américain affaiblit gravement le dispositif, puisque le pays était historiquement le plus grand contributeur au budget de l’organisation. Tedros a bien tenté de tempérer, affirmant, dans Le Monde, que « dans notre monde divisé, les nations peuvent encore travailler ensemble pour trouver une réponse partagée aux menaces communes », mais la dissonance est criante.

D’autant plus que, dans une déclaration parallèle, l’OMS reconnaît que le multilatéralisme est en crise, plombé par les réductions de financements, notamment ceux venus de Washington. L’ex-présidente néo-zélandaise Helen Clark, coprésidente du panel d’experts sur les pandémies, a néanmoins lancé un avertissement sobre, dans des propos rapportés par Le Monde : « À une époque où le multilatéralisme est menacé, les États membres se sont unis pour dire que nous vaincrons la prochaine menace de pandémie de la seule manière possible : en travaillant ensemble ».

Un traité, et après ? L’accord n’est pas encore opérationnel Loin d’être immédiatement applicable, le texte adopté doit encore être présenté devant l’Assemblée mondiale de la santé en mai. Il s’agit pour l’heure d’un projet : les modalités d’exécution, le financement et les mécanismes de contrôle restent à définir. La transformation structurelle du Règlement sanitaire international (RSI), en parallèle, n’est pas achevée non plus. Mais l’OMS y voit déjà un socle de stabilité à venir. Dans un communiqué officiel, elle précise que l’accord vise à éviter que les conséquences du Covid-19 ne se répètent.

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Rédactrice dans la finance et l'économie depuis 2010. Après un Master en Journalisme, Stéphanie a travaillé pour un courtier en ligne à Londres où elle présentait un point bourse journalier sur LCI. Elle rejoint l'équipe d'Économie Matin en 2019, où elle écrit sur des sujets liés à l'économie, la finance, les technologies, l'environnement, l'énergie et l'éducation.

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